La poste aux lettres au pays des Solliès
Des origines à la Révolution
Les archives municipales de la communauté de Solliès (qui regroupait alors les paroisses de Solliès-Ville, Solliès-le-Pont, Solliès-Toucas et Solliès-Farlède) d’avant la Révolution sont muettes sur la présence d’un messager allant chercher à Toulon le courrier officiel et celui des particuliers (fig. 02.)
Il devait cependant y en avoir un.
En effet, dans l’inventaire des archives de Belgentier :
— les comptes de trésorerie de 1775 – 1776 mentionnent un remboursement au préposé du bureau de Solliès de 3 livres 10 sols pour le port de lettres ;
— une délibération du 14 février 1779 accorde une allocation annuelle de 12 livres au receveur de la poste à Solliès pour apporter ou faire apporter toutes les semaines le courrier de la communauté ou des habitants du lieu (fig. 03a & b).
Dans une délibération du conseil municipal de Solliès du 8 juin 1793, donnant un avis négatif sur l’ouverture d’un bureau à Cuers, on trouve également :
« qu’il y aurait un préjudice considérable pour cette commune (Solliès) dont on a reconnu de tout temps la nécessité d’y avoir un bureau et que ce bureau existe depuis très longtemps... »
La Poste de 1793 à 1830
Les événements liés au siège de Toulon par les armées révolutionnaires vont apporter quelques modifications dans la région.
Tout d’abord, la mise en place du siège ayant entraîné la rupture des relations de TOULON avec le reste du département et donc la fermeture du relais de la poste aux chevaux, un relais est ouvert à Solliès (en relation avec Le Luc). Mis en service entre le 10 et le 20 septembre 1793 il assure le port du courrier dans la partie Est de l’aire toulonnaise. Il y restera jusqu’en 1802. D’autre part, les royalistes ayant pris le contrôle d’Hyères le 28 août 1793, le siège du district est transféré à Solliès le 24 septembre. La reprise d’Hyères par les républicains le 20 octobre entraîne le départ vers Toulon de nombreux notables hyérois.
C’est ainsi que le 6 novembre une délibération du conseil municipal de Hyères constate que « le citoyen Bonnefoy, directeur de la poste aux lettres, a vraisemblablement fui puisque depuis quelque tems il ne paraît plus ». On lui nomme un remplaçant, mais le bureau de poste est stratégiquement trop important, car il dessert une zone occupée par les troupes du siège de Toulon.
C’est pourquoi, sans doute par mesure de sûreté, il va très rapidement être déplacé à Solliès-Pont comme le montre une lettre écrite à La Garde par un militaire le 21 novembre 1793 et portant la marque manuscrite Solliès/78 (fig. 04).
Certes le terme de directeur de la poste aux lettres est quelquefois employé de manière abusive pour désigner un simple distributeur local, mais pourquoi dans ce cas prévenir le directeur de la poste pour les armées ?
Le nouveau bureau de Solliès appose sur les lettres la mention manuscrite 78/Solliès connue jusqu’au 23 mars 1794 (3 germinal an II). Il reçoit ensuite une marque 78/SOLLIERS, vue à partir du 9 avril 1794 (fig. 05).
Le bureau de distribution
Mais le bureau de Solliès n’aura qu’une vie assez courte. En effet le 16 octobre 1796 l’administration des Postes annonce au Conseil municipal de Solliès à la fois le transfert du bureau à Cuers et la desserte de la commune par ce bureau (fig. 06). Bien entend, le Conseil proteste et demande à être desservi par le bureau de Toulon. Cette demande est refusée.
On nomme alors un distributeur des lettres (c’est-à-dire chargé de la distribution dans la commune aux frais de la municipalité).
Fig. 06 : Pli du 3 novembre 1813, par porteur de Solliès à Cuers et 4 décimes de Cuers à Nice.
En mai 1815, un bureau de distribution est ouvert à Solliès-Pont.
D’abord rattachée administrativement au bureau de direction de Cuers, elle reçoit en janvier 1819 la cursive double 78/Solliès/CUERS (fig. 7).
En 1825, cette marque est remplacée par une autre cursive double 78/Solliespont/TOULON-VAR (fig. 08). Cela indique que désormais, c’est Toulon qui gère la distribution de Solliès. Mais elle est toujours en correspondance locale avec Cuers.
— en 1834, une nouvelle cursive est fournie, légèrement différente (le 8 de 78 est entre le « i » et le « e » de Sollies (alors qu’il était entre le « e » et le « s » dans la marque précédente) (fig. 10).
Le bureau de direction
Le 1er mars 1840, le bureau de Solliès est érigé au rang de bureau de direction (c’est-à-dire qu’il devient un véritable bureau de poste !).
Il reçoit alors un timbre à date au type 15 (petit format) portant le libelle SOLLIES-PONT (78) (fig. 11). En juin 1856, le timbre à date change et porte la mention SOLIES-PONT (78) (fig. 12). Il y aura un nouveau changement en 1868 : on retrouve le libellé SOLLIES-PONT (78) (fig. 13).
À partir de 1868, le bureau de Solliès utilisera deux autres timbres à date : celui au type 16 (petit format avec indication de levée) (fig. 14) et celui au type 17 (grand format avec indication de levée) (fig. 15.) Plus tard, sans qu’il soit possible de donner une date exacte, il utilisera le timbre à date au type 18 SOLLIES-PONT Var (fig. 16) (je le connais à partir d’octobre 1881).
La poste rurale
Le 1er avril 1830, la création du service rural fait dépendre définitivement les quatre communes (ainsi que Belgentier) de Solliès-Pont. Chaque village est muni d’une boîte aux lettres. L’indicatif de ces boîtes rurales est :
Les boites aux lettres en 1847 :
— Belgentier : sur la place publique sur la grand-route, en saillie sur une maison particulière ; elle est au centre de la commune ;
— Solliès-Farlède : dans l’épaisseur du mur de la maison curiale (presbytère) située sur la place publique sur la grand route ; elle est au centre de la commune ;
— Solliès-Pont : sur la grand-place, au centre du village, dans l’épaisseur du mur de la maison du directeur (de la poste) ;
— Solliès-Toucas : en saillie au centre de la commune sur une maison particulière en face d’une statue et contre une muraille ;
— Solliès-Ville : dans l’épaisseur du mur d’une maison particulière sur la place au centre du village (fig. 21).
Enquête de l’Administration des Postes en novembre 1847
Courrier adressé à la commune pendant 14 jours | |||||
Lettres extérieures | Lettres locales | Journaux | Imprimés | Lettres pour les fonctionnaires publics | |
Belgentier | 69 | 2 | 27 | 5 | 12 |
La Farlède | 67 | 46 | 10 | 15 | |
Solliès-Toucas | 52 | 8 | 34 | 4 | 5 |
Solliès-Ville | 39 | 43 | 2 | 5 | |
Courrier envoyé par la commune pendant 14 jours | |||||
Lettres extérieures | Lettres locales | Journaux | Imprimés | Lettres pour les fonctionnaires publics | |
Belgentier | 37 | 5 | |||
La Farlède | 24 | 8 | |||
Solliès-Toucas | 35 | 1 | 11 | ||
Solliès-Ville | 10 | 6 |
Courrier par an et par habitant (à l’exception des journaux, imprimés et du courrier pour les fonctionnaires) |
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Population | Lettres reçues par an et par habitant |
Lettres envoyées par an et par habitant |
Taxe moyenne d'une lettre reçue |
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Belgentier | 1140 | 1,62 | 0,84 | 0,24 franc |
La Farlède | 985 | 1,77 | 0,63 | 0,37 franc |
Solliès-Toucas | 1266 | 1,29 | 0,74 | 0,33 franc |
Solliès-Ville | 814 | 1,28 | 0,32 | 0,39 franc |
La poste ferroviaire
On aura ensuite ouverture de la ligne entre Nice et Monaco le 9 octobre 1868, prolongation entre Monaco et Menton le 6 décembre 1869 et enfin le 18 mars 1872, ouverture de la ligne entre Menton et Vintimille, faisant la jonction avec la ligne de la côte ligure ouverte deux mois plus tôt, le 25 janvier 1872. La gare de Solliès-Pont est munie d’une boîte aux lettres (fig. 27) (payée par la municipalité) et relevée au passage du train par le courrier convoyeur. Celui-ci appose son timbre identificateur sur le courrier.
On connait les timbres suivants pour Solliès :
— ligne Marseille – Nice (et retour) ;
— ligne Marseille – Menton (et retour) (fig. 28) ;
— ligne Marseille – Vintimille (et retour.)
À noter que bien qu’il y ait une gare à La Farlède, on ne connait pas de timbre relatif à cette gare (absence de boîte).
La poste de nos jours
Le bureau de Solliès-Pont (fig. 29) est l’un des trois cent cinquante bureaux de poste équipés au 1er janvier 2015 de nouveaux services, d’espace « Préparez vous-même vos envois » et de nouveaux automates.
— Textes Alain TRINQUIER — Novembre 2014 — Illustrations Pascal Yves GRUÉ —