CONCLUSION
Les recherches entreprises aux Laugiers témoignent d’occupations humaines successives plus ou moins denses selon les époques. Elles ont révélé pour les périodes anciennes seulement des traces éparses et très dispersées, signalées par des structures mal conservées et par du mobilier, foyer plat peut-être préhistorique au sud-ouest (TR 4), restes d’une structure empierrée du premier âge du Fer au sud (TR 65), et matériaux réutilisés d’une ancienne structure bâtie de l’âge du Fer au nord (TR 48). Mais l’essentiel des découvertes appartient à l’Antiquité avec la mise au jour non seulement de traces agraires ayant appartenu non seulement des traces agraires d’un vignoble accompagné peut-être de fossés (FO2307, 2402, 5501, 5902, 6012), mais surtout d’une petite nécropole fréquentée du Haut-Empire à l’Antiquité tardive puisqu’elle a connu au moins deux phases, avec un enclos funéraire et des crémations datables de la seconde moitié du IIe siècle de notre ère et des sépultures à inhumations en amphores et en bâtière pouvant être situées entre le IVe et le VIe siècle de notre ère.
Dans la région ces petites nécropoles ne sont pas inconnues. On évoquera en particulier trois sites qui possèdent un enclos funéraire. Le plus proche, signalé à Solliès-Toucas, était légèrement rectangulaire avec une longueur de 14,80 m pour une largeur de 14,21 m. Un second, à La Bégude, délimitait une aire de 8,70 m sur 7 m avec quatre urnes à crémation. Enfin, les deux derniers, aux Esclaveaux, qui étaient liés à une villa romaine, mesuraient 6 m sur 5,50 m et contenaient cinq tombes à crémation (Brun et al. 1999, p. 170). On ignore aux Laugiers si on doit associer cette petite nécropole à la proximité d’une voie importante ou à une villa dans la mesure où on n’a découvert ni l’une ni l’autre dans nos sondages. La première, difficilement repérable, peut échapper à des investigations menées avec un maillage de tranchée. Elle peut être aussi peu visible et confondue avec des structures linéaires interprétées dans le cas présent comme des fossés (FO ? 4004 et FO ? 3706), où seule une étude plus approfondie dans le cas d’une fouille permettra de compléter l’analyse. Quant à la villa, elle n’est pas présente sur la zone sondée. Elle pourrait alors s’étendre soit sous les secteurs boisés et protégés à l’ouest de l’emprise, soit sous les zones pavillonnaires environnantes, en particulier celles situées au nord. Quant aux sépultures à crémation, elles s’avèrent être le rite exclusif durant les Ier et IIe siècles de notre ère et peut se prolonger parfois au IIIe siècle comme c’est le cas à Cabasse.
Certaines caractéristiques de la sépulture 4006 des Laugiers se retrouvent dans des sépultures appartenant à d’autres sites. On retrouve l’utilisation d’amphore Dressel 20 à La Guérine (tombe 7) et des urnes en verre (protégée dans ces exemples par des urnes en grès) pour des personnes aisées aux Thouar 4, à la Bégude et au Castel Roubine (Brun et al. 1999, p. 168). Mais, on s’aperçoit que chaque crémation reste unique et originale non seulement dans son organisation, mais aussi dans la composition du mobilier du dépôt funéraire, même si on peut remarquer des éléments communs (balsamaire, monnaie, vases à liquide, etc.), d’où la nécessité de fouiller ces tombes très finement et très scrupuleusement. Les rites et les gestes funéraires restent en réalité très liés à la personnalité et aux croyances du défunt et de son entourage, Pour les inhumations, en l’absence totale de fouille, on ne peut guère faire de remarques. On rappellera seulement que les sépultures en bâtière apparaissent dans la région dès la fin du IIIe siècle et qu’elles connaissent une grande vogue à partir des IVe et Ve siècles. Les plus anciennes, du dernier quart du IIIe siècle ou du début du IVe siècle sont connues au Thouar, à Costebelle, à l’École Lafayette et aux Garvières, à Brue-Auriac. Quant aux sépultures dans des amphores africaines où sont inhumés des enfants et des adolescents, elles sont attestées à la fin du IVe siècle à Olbia et à Costebelle. Ce type de sépultures deviendra courant à la fin du Ve et au VIe siècle de notre ère (Brun et al. 1999, p. 192).
Les époques plus récentes sont aussi présentes, mais uniquement sous forme de traces agraires observées sur la totalité de l’emprise. Ce sont des fosses de plantations de différentes formes ou des fossés. Ces vestiges sont liés à l’exploitation sans doute presque continue de ces terres, comme en témoigne le mobilier céramique recueilli dans les sédiments brassés par les labours qui appartient pour le plus ancien au XVIe siècle et pour le plus récent au XIXe siècle. Dans certains secteurs, comme au-dessus de la nécropole antique, les productions des XVIIe siècle et XVIIIe siècle sont bien représentées.
On mentionnera, enfin, le réseau de petits canaux d’irrigation encore en service dont certaines martellières témoignent de leur installation ancienne (au moins au XIXe siècle). Il conviendrait de les conserver dans l’avenir.