Les Fontaines de Solliès-Pont

Solliès-Pont

 

Aux XVII et XVIIIes siècles la solution utilisée pour l’adduction en eau dans les villages est le fil de l'eau, qui descend naturellement par gravité dans un canal à ciel ouvert.

Détail de sculpture de la fontaine, rond-point du château, Solliès-Pont.
Fontaine du rond-point du Château, détail.

L’eau va de fontaine en fontaine, la surverse de la première alimentant la suivante. Les usages différents de l’eau se répartissant tout au long de cette ligne : au point le plus haut, l’alimentation des habitants, puis les animaux, les usages domestiques et l’arrosage des jardins, le point le plus bas. (Belgentier 2, Solliès-Toucas 2, 3, 11, 12, 15, Solliès-Pont 1, 2, Solliès-Ville 1, 4, 5, La Farlède 1, 8).
Quand l’eau est peu abondante, les fontaines sont rares et fort simples ; le souci majeur des municipalités est donc la recherche de sources pérennes, l’amélioration des captages et l’acheminement de l’eau vers les différents quartiers des villages qui petit à petit s’étendent.
L’Empire et son administration sont à l’origine de la création des départements et parallèlement les ingénieurs des Ponts et Chaussées, en hommes de terrain participent à l’aménagement du territoire et aux travaux d’adduction d’eau (Solliès-Toucas 8, 9, Solliès-Ville 3)

Les matériaux changent et la fonte remplace de plus en plus la terre cuite qui, poreuse et fragile, provoque des pertes importantes, l’eau coulant à la fontaine correspondant à la moitié voire au quart du volume capté à la source. Le prix de la fonte baissant au cours du siècle va également favoriser son utilisation.

Le XIXe siècle est l’âge d’or des fontaines et dans tous nos villages, bornes-fontaines, fontaines centrales ou adossées, fontaines-lavoirs et puits dans les plaines vont voir le jour, dessinés par les ingénieurs des Ponts et Chaussées, les architectes voire le maçon du village (Belgentier 7, 9 à 14, La Farlède 5, Solliès-Pont 3, Solliès-Toucas 6, 10, 13).

Dans la seconde moitié du XIXe siècle, la technique du réseau va permettre de multiplier les adductions d’eau. La résistance des matériaux, le calcul des sections des tuyaux vont permettre d’augmenter la taille des conduites et donc le volume d’eau disponible.
La loi sur la salubrité de 1902 va accélérer le développement des réseaux, car il est urgent de lutter contre les épidémies de choléra, de typhoïde, causées par les eaux polluées.
Aujourd’hui chaque commune, chaque habitation dispose de l’eau courante et les rôles les plus importants de la fontaine ont disparu (La Farlède  11 à 13, Solliès-Pont 11 à 16).

Heureusement les fontaines du passé gardant leur charme décoratif, permettent une meilleure compréhension de l’histoire urbaine, offrent aux artistes peintres ou photographes des sujets de choix et conservent leur rôle de point d’eau pour les promeneurs. On peut regretter que beaucoup d’entre elles arborent un « Non potable » alors qu’elles ont désaltéré des générations.

Certes, la construction des nouvelles fontaines a beaucoup diminué, mais on constate que nombre de projets décoratifs d’embellissement urbain passent par la création d’une fontaine, partie intégrante de cet espace (Solliès-Toucas 16, Solliès-Pont 9, 10, Solliès-Ville 6, La Farlède 9, 10).

  • Les fontaines dans la vallée, Solliès-Pont 1b.
  • Les fontaines dans la vallée, Solliès-Pont 2.
  • Les fontaines dans la vallée, Solliès-Pont 3.
  • Les fontaines dans la vallée, Solliès-Pont 4.
  • Les fontaines dans la vallée, à Solliès-Pont 5b.

 

 

 

HISTOIRE DES EAUX D’ARROSAGES
ET DES EAUX POTABLES
DANS LA COMMUNE DE SOLLIÈS-PONT

Par Georges Durando

Maire de Solliès-Pont, article paru dans :
Le Petit VaroisLa Marseillaise du 18 au 21 mars 1958

 

Des jeunes gens reprirent et promenèrent le drapeau tricolore, et d’autre part l’opposition constitutionnelle dans laquelle se lançait la bourgeoisie libérale avec ardeur (triompha à la fin du règne de Charles X qui avait aboli la liberté de la presse) par la révolution de 1830 qui éclata à Paris renversant la dynastie des Bourbon.
D’après diverses archives, nous avons pu noter que c’est en 1823 que les comtes de Saporta, seigneurs de la commune, laissèrent construirent le grand canal d’arrosage devant desservir les quartiers connus aujourd’hui sous les noms des : Laugiers, Fillols, Trois Pierres, les Terrins et plus tard La Tour.
Naturellement fut édifiée à l’époque l’écluse dite des « Messieurs » probablement en l’honneur des Saporta qui « sacrifiaient » un peu de leur terre pour la retenue indispensable des eaux.
Le sacrifice n’était pourtant pas très grand puisqu’encore de nos jours le château, malgré qu’il fut vendu en 1921 par les Saporta aux Hoirs Fontaine, bénéficie de la totalité de l’eau pendant 24 heures du samedi à midi au dimanche à 12 heures, alors qu’elle est divisée en cinq parts pour les quartiers.
Les paysans de l’époque qui firent les travaux ne perçurent qu’un cinquième d’une eau qui aurait dû être répartie au prorata de la surface irrigable.
La Révolution de 1830 ne changea donc rien en la matière. Il est vrai que la royauté se continuait avec Louis-Philippe 1er et quoiqu’il eut adopté le drapeau tricolore et reconnut la souveraineté du peuple.
Louis-Philippe et sa monarchie furent à leur tour renversés par la Révolution de février 1848, ce qui marqua la fin du régime de la bourgeoisie.
Cette fois la République est proclamée, le suffrage universel élit l’Assemblée nationale constituante, mais de nombreux départements dont la Provence sont travaillés sourdement par des sociétés secrètes et en 1852 Louis Bonaparte fit son coup d’État le 2 décembre.
L’insurrection éclata en Provence, des bandes de paysans insurgés occupèrent Brignoles, Forcalquier, Sisteron, Digne, etc. L’Empire fut rétabli par le plébiscite du 7 novembre 1852.
Et les paysans, malgré ces changements, restèrent encore avec la petite part de cette eau si précieuse comme ils le sont, hélas ! encore de nos jours, malgré l’étendue toujours plus grande des terres mises en valeur.
Les besoins se multiplient, l’on pourrait irriguer toute la plaine de nos jours, mais les lois féodales se perpétuent et les préfets, quoique maîtres des eaux, ne font rien pour les changer.
Est-ce parce qu’ils furent institués par Napoléon ? Toujours est-il que les rivalités divisent les quartiers que des procès interminables ruinent sans apporter une seule goutte d’eau de plus.
Vers 1948 l’on voulut reprendre l’ancienne idée du captage des eaux du Latail pour l’adduction d’eau du Beausset en particulier. Il ne suffisait pas de l’expérience de 1923 où il fut fait la preuve que le Latail était l’affluent principal du Gapeau, pour ce lancer dans cette aventure qui aurait asséché notre rivière et ruiné notre vallée.
Une levée de boucliers se fit de Belgentier à Hyères et le préfet de l’époque que je sollicitais au Conseil général, prit l’engagement de nous tenir au courant de toute initiative à ce sujet.
Les protestations, les vœux des Conseils municipaux, les démarches des maires et des associations agricoles décidèrent les auteurs du projet à l’abandonner définitivement.
Ce n’est pas pour autant que l’on resta longtemps tranquille. Voilà qu’un nouveau projet fut mis en avant et que la menace pour venir d’un autre côté n’était pas moins grave.
Cette fois, c’est à Solliès-Pont même, dans les profondeurs des terres en amont de la source qui alimente la ville, que l’on voulait s’en prendre.
À cet effet, nous fûmes convoqués (maires, dirigeants des C. G. A. et syndicat de quartier) par le Génie rural à Toulon où l’on nous fit connaître ce projet qui devait ne nous porter aucun préjudice.
Il me semble voir encore le géologue qui au tableau noir nous donnait la leçon sur l’éventualité toute problématique d’enlever l’eau de la cuvette naturelle qui se trouverait dans le quadrilatère (Solliès-Toucas, Les Aiguiers, Rebœuf, Solliès-Pont) pour alimenter la ville d’Hyères, La Londe, etc., avec la garantie pour nous de recevoir en surface la quantité d’eau que nous percevions auparavant, sinon un peu plus.
La réunion ne dura pas longtemps, à la première question que je posais, notre géologue fut désarçonné.
Elle fut celle-ci : « Pouvez-vous nous donner l’assurance que l’humidité qui résulte de l’infiltration permanente de cette nappe d’eau qui s’étend dans toute la plaine se continuera ? Pouvez-vous nous assurer que les diverses sources qui alimentent les puits, puis à moteur, le petit Réal, la Jonquière ne seront pas taries ? »
Cette assurance ne nous étant pas donnée, nous refusâmes de suivre le Génie rural dans cette nouvelle affaire, nous réservant d’alerter à nouveau, communes et usagers… et une nouvelle fois le projet fut abandonné.
Comme nous venons de le voir, quelque régime que nous ayons vécu, toujours les paysans ont fait les frais de la politique de leurs dirigeants réactionnaires. Tout ce qui servait les riches de 1830 les sert de nos jours.
Dans la nuit du 4 août, la bourgeoisie abandonna les titres de noblesse, mais conserva ses privilèges et ses titres de rentes.
L’exemple de l’arrachage des vignes qui a coûté au gouvernement 17 milliards de francs pour en venir à la vente aux tickets prouve d’une part l’insouciance de ceux qui ne connaissent rien à la terre et d’autre part le souci de favoriser certains colons au préjudice des paysans de la métropole.
Peut-on nous accuser de vouloir une politique de paix, lorsque nous disons qu’il faut en finir avec la guerre qui dure depuis 20 ans ?
Combien de barrages eut-on pu ériger dans notre département qui se prête facilement à ces retenues d’eau, avec des milliards engloutis inutilement à faire ces guerres sans issue ? Combien de milliers d’hectares restent stériles et des travailleurs de la terre sans biens par la faute d’une telle politique ?
Au moment où tout va mal pour notre économie, au moment où tous les Français veulent voir évoluer le progrès social et la paix, l’amitié entre les peuples on intensifie la guerre d’Algérie, on veut installer des rampes atomiques étrangères en France.
Qu’est-ce que cela peut rapporter aux Français, aux ouvriers et aux paysans ?
Revenons à notre sujet et voyons ce qu’il est de l’eau potable de consommation familiale. Dans la commune, nous ne sommes pas privilégiés à cet égard comme pour l’eau d’arrosage nous retrouvons les mêmes difficultés, encore une fois l’emprise du château pèse lourdement sur les contribuables.
Un accord datant du 19e siècle intervint entre la ville et les Saporta, il fallait construire les écoles, aucun terrain ne convenait à proximité, le conseil municipal sollicita les seigneurs qui acceptèrent sa construction sur l’avenue des Lices, actuellement avenue du 6e RTS, baptisée en 1945 en l’honneur de ce régiment qui participa à la libération des Solliès.
Quoique l’on ne circulait à l’époque qu’avec des draisiennes, les Saporta ne perdirent pas les pédales. Par un accord notarié, ces derniers cédèrent l’enclave qui groupe les bâtiments des écoles de filles, maternelle et de garçons, à la charge de la commune de construire le mur de séparation qui resterait la propriété du château, mais que la commune devait entretenir. Charmant, n’est-ce pas ? Mais tenez-vous bien, en contrepartie de ce don !… la ville était tenue de livrer journellement 30  000 litres d’eau au château (d’eau potable s’entend) tant que la source serait réputée pouvoir fournir l’eau à la ville, soit jusqu’à son tarissement, l’eau arrivant par gravitation.
Plus de cent ans après, en 1937, l’on jugea insuffisante l’arrivée d’eau et l’on entreprit le projet de l’adduction qui nous sert de nos jours, le puits fut creusé dans le terrain Gerfroit à cent mètres du Gapeau, le réservoir construit sur les hauteurs de la colline en face les Sénès.
À ce moment le Conseil municipal pouvait se libérer de l’emprise insupportable du Château, le contrat n’ayant plus lieu d’être dans cette situation.
Tarissement de la source d’une part, frais considérables pour la commune pour ces grands travaux et paiement de l’eau par les usagers, celle-ci n’arrivant que par pompage électrique d’autre part.
Il faut croire que la majorité du Conseil municipal qui vota par 19 voix contre deux le nouvel accord, cette fois avec le sieur Marant, l’un des propriétaires, n’entrevit pas les conséquences désastreuses (pour ne pas dire plus) qu’il engageait non pas contre la ville, mais contre toute la population.
L’accord reconduisait celui passé antérieurement, la ville continuerait à perpétuité à donner au Château 30 000 litres d’eau potable par jour.
Il me souvient qu’étant jeune, les vieux de notre village disaient que les Saporta étaient de bonnes gens, pensez, chaque fois que l’un d’eux mourait, l’on donnait cinq francs pour porter un cierge derrière le corbillard, tous les gamins de l’époque, et j’en fus un, trimbalaient ces cierges comme pour une première communion en souhaitant que l’on meure souvent dans cette famille.
Si les Saporta avaient le souci évident de leurs privilèges et s’ils ne donnaient pas facilement ou faisaient semblant de donner il n’en fut pas de même de la part de leurs successeurs, en mal naturellement : qui ne se souvient de l’attitude de celui qui fut président de la délégation spéciale sous Vichy envers la population !
En fait toujours le Château fut l’ennemi des Solliès-Pontois jusqu’à ce qu’il fut vendu et morcelé ces derniers temps.
Il reste toutefois le problème des eaux à régler, il faudra une fois pour toutes envisager cette solution.
Pour les terres, la part de chacun doit être fonction de leur surface par rapport à la quantité reçue de la rivière.
Pour la consommation tout le monde doit payer la quantité de mètres cubes consommés, il ne peut pas y avoir d’autre procédé ; chacun payant les mêmes impôts pour les propriétés non bâties et le même tarif au mètre cube d’eau potable.

 

 

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